Quand l’amour me trahit et le chagrin me tue,
Et que d’indignation je sens battre mon coeur,
Je viens àtoi alors, о ma chère statue,
Contempler ton regard et conter mon malheur.
«Sois digne et calme, ami — me dit ton doux visage —
La colère ne va qu’aux coeurs flétris et vieux;
N’écoute pas sa voix, écoute mon langage,
Il te fera chanter, il est celui des dieux.
Je suis ta triste soeur, je suis Mélancolie,
Tu pourrais me briser, mais jamais me plier...
On t’a fait de la peine, — et bien, poète, oublie...
Hélas! pour être heureux il faut bien oublier».
Tu me parles ainsi. En tremblant je t’écoute
Comme un vieux prisonnier, qui tremble dans ses fers,
Quand il entend chanter sous l’implacable voûte...
Et je laisse couler mes larmes et mes vers.
Mais quand par un baiser soudain, irrésistible
Mon coeur est ranimé et mes pleurs sont taris,
Alors je crois à tout, je crois à l’impossible,
Je crois que tu t’en vas, je crois que tu souris.
11 октября <1865>